YV
xvuts
Art. Ethno. n° 91
M. V A S S Y
Pharmacien à Vienne
ET
M. M Û L L E R
Bibliothécaire de l'Ecole de Médecine de Grenoble
zyxvutsrqpo
liUTSR
UN ATELIER GALLO-ROMAIN
DE
FIMUCiliT DE C1IIRIIIÊRES EN 01!
A
SAINTE-COLOMBE-LES-VIENNE
Extrait des Comptes rendus de
l'Association
Française pour l'Avancement
CONGRÈS
DE REIMS -
PARIS
SECRÉTARIAT
DE
RUE
1907
UTSR
L'ASSOCIATION
(Hôtel des Sociétés savantes)
28,
des Sciences
SERPEN T E
ASSOCIATION FRANÇAISE
POUR
L'AVANCEMENT
Fusionnée
L'ASSOCIATION
DES
avec
SCIENTIFIQUE
DE
(Fondée p a r Le V e r r i e r en 186;
CONGRES
DE
M.
zvu
zyxv
oSRO
SCIENCES
FRANCE
REIMS. — 19o7
YVUSRPM
VASSY
Pharmacien
;i Vienne,
ET
M. MU LLER
Bibliothécaire de l'Ecole (le Médecine de Grenoble
vutsrpon
Un atelier Gallo-Romain de fabricant de charnières en os
à Sainte-Colombe-les-Vienne
— Séance du 2 uoùt —
Pendant le mois de m a r s 1907, au cours de fouilles pratiquées dans une
propriété, appartenant à Mme veuve Grange, de
Sainte-Colombe-lès-Vienne, nous avons r e m a r q u é et ramassé une quantité de débris osseux, portant des traces très nettes d ' u n travail h u m a i n .
Ces os, mêlés à de n o m b r e u x f r a g m e n t s de céramique, exclusivement
gallo-romaine, ont été extraits d ' u n e impasse, située entre deux murs,
ayant les caractères de travaux romains.
La présence, p a r m i ces débris, de f r a g m e n t s d'os tournés et inachevés,
avec d ' a u t r e s bien cylindriques et ayant toutes les apparences d'objets
achevés, nous a fait supposer que nous étions en possession des déchets
d ' u n fabricant, de ce q u ' o n est convenu d'appeler des charnières on os
romaines.
La propriété où nous avons recueilli ces os, est située sur la c o m m u n e
de Saint-Romain-en-Gal,
à quelque cent mètres d u pont de Sainte-Colombe, à Vienne.
Cette propriété a, d a n s son sol, de nombreuses substructions galloromaines et plusieurs mosaïques remarquables. L ' u n e de celles-ci est au
2
CONGRÈS DE R E I M S .
zyxvuts
1907
musée-bibliothèque de Grenoble, à qui elle a été offerte par M. le général
de Beylié.
Quelques amphores cylindriques et d'autres sphériques, très nombreuses, ont été également retirées de cette propriété ; c'est au cours des recherches opérées par le fermier, pour mettre d'autres amphores à jour,
que les os, qui font le sujet de cette communication ont été recueillis.
zvutsrpon
yx
Voici l'inventaire descriptif des os récoltés :
150 f r a g m e n t s , plus 5 c h a r n i è r e s ou portions de charnières.
P a r m i ces débris, q u a t r e os longs n e s e m b l e n t pas avoir été destinés à fabriq u e r des charnières, h u i t autres de 90 et 170 m i l l i m è t r e s de l o n g u e u r o n t subi
u n c o m m e n c e m e n t de façonnage p o u r p r o d u i r e des charnières (Jig. 1 el 2).
Γιο
FIG. 2 (réduite de deux liei>j
. 1 (réduite do deux tiers).
Tous ces os ou fragments paraissent provenir de métacarpiens de
bovidés, et deux ou trois seulement, paraissent être des fragments de tibias de bœuf. Toutes les épiphyses ont été enlevées à la scie, avant leur
équarrissage. Les uns ont appartenu à des animaux adultes ; quelquesuns, pourtant, proviennent d'animaux très jeunes et, l'ait curieux, onze
tètes d'os sciées, retrouvées dans la fouille, proviennent toutes d'animaux
très jeunes ; leurs épiphyses sont absentes et les sections produites par la
scie n'excèdent pas 23 millimètres de diamètre. Nous n'avons recueilli
aucune tête ou apophyse d'os d'animaux adultes.
Parmi les os longs, un seul ne porte qu'une face longitudinale d'équarrissage ; les autres en ont jusqu'à six.
CHARNIÈRES
Les charnières ou fragments de charnières (fig. 3) recueillies au cours
des fouilles sont semblables à celles ramassées au Monétiers-Allemont
(Hautes-Alpes), dans un sol également
gallo-romain, et à toutes celles que nous avons pu observer dans les musées de Paris, dans les musées et collections particulières de Reims où elles sont très abonFIG. 3 ( d e m i - g r a n d e u r ) dantes, à Autun, à Lyon, à Roanne, à Vienne, etc.
Toutes sont parfaitement cylindriques ; la plupart
portent un trou transversal ; quelques-unes en ont deux, rarement trois.
YASSY
ET
MÛI.LER.
Voci q u e l q u e s m e n s u r a t i o n s
ATELIER
obtenues sur
zyxvuts
GALLO-ROMAIN
3
les é c h a n t i l l o n s q u e
nous
a v o n s p u e x a m i n e r à loisir :
Sur h u i t charnières de Sainte-Colombe où de Vienne, trois o n t 30 millimètre et deux ont 33 m i l l i m è t r e s de h a u t e u r (ou l o n g u e u r ) , sur 24 et 25 millimèm è t r e s de diamètre. Dimensions de leur cavité médulaire, 12 à 18 m i l l i m è t r e s
d a n s le plus g r a n d d i a m è t r e . Une, usagée, avec deux trous, a 87 m i l l i m è t r e s
de l o n g u e u r , 22 m i l l i m è t r e s de d i a m è t r e ; l ' u n e de ses extrémités est ornée de
trois filets en creux ; l ' a u t r e , encore sous le coup de scie, devait être dissimulée. Lue c h a r n i è r e à deux trous, mais f r a g m e n t é e l o n g i t u d i n a l e m e n t , m e s u r e
71 millimètres de l o n g u e u r et 22 millimètres de diamètre.Une de ses extrémités
ornée (le trois filets en creux, l'autre porte encore les traces d u sciage. Une autre charnière, cassée au t o u r n a g e m e s u r e 81 m i l l i m è t r e s de l o n g u e u r et 24 millimètres de d i a m è t r e .
Sur six charnières d u Monétier-Allemont, q u a t r e m e s u r e n t 27 et 27 millimètres et demi de l o n g u e u r avec 25 et 25 m i l l i m è t r e s et d e m i de d i a m è t r e .
Une autr e a 33 m i l l i m è t r e s de l o n g u e u r et 27 m i l l i m è t r e s de d i a m è t r e : la
plus longue a 37 m i l l i m è t r e s de l o n g u e u r et 27 millimètres et d e m i de diamètre. Les cavités médullaires m e s u r e n t de 12 à 19 millimètres de d i a m è t r e .
Une autre, de provenance i n c o n n u e , a 27 m i l l i m è t r e s de l o n g u e u r et 22 millim è t r e s de diamètre.
Une petite charnière, également de provenance inconnue, a 22 millimètres
de l o n g u e u r et 12 m i l l i m è t r e s de largeur ; les cavités médullaires de ces deux
dernières, m e s u r e n t 17 et 11 m i l l i m è t r e s de diamètre.
Les d i m e n s i o n s des trous transversaux de toutes les charnières ci-dessus sont,
p o u r celles de Vienne, de 6 millimètres et demi, 7 et 8 millimètres de d i a m è t r e .
Pour celles d u Monétier, de 8 millimètres et, p o u r les deux inconnues , de
β millimètres.
MANUEL
yx
OPÉRATOIRE
On p e u t , d ' a p r è s l ' i n s p e c t i o n d e s d é b r i s o s s e u x d é c r i t s c i - d e s s u s ,
re-
c o n s t i t u e r d e la f a ç o n s u i v a n t e le m a n u e l o p é r a t o i r e d u f a b r i c a n t :
Les m é t a c a r p i e n s , p r o b a b l e m e n t f r a i s , o n t d ' a b o r d été sciés a u x d e u x
b o u t s p o u r en é l i m i n e r les é p i p h y s e s . Les os f r a i s s o n t p l u s t e n d r e s ; il
f a u t savoir aussi q u ' u n e m a c é r a t i o n d e q u e l q u e s j o u r s les r e n d
moins
c a s s a n t s s o u s l ' o u t i l , q u i les e n t a m e p l u s f a c i l e m e n t .
C ' e s t à ce m o m e n t q u e ces os o n t été é q u a r r i s , à l ' a i d e d ' u n
couperet
t r è s affilé, p r o b a b l e m e n t d u t y p e de la s e r p e , o u t i l t r è s en u s a g e , e n dimensions variables dans l'industrie gallo-romaine.
La s e r p e a laissé d e s t r a c e s m o n t r a n t u n e g r a n d e s û r e t é d e m a i n chez
zvut
l ' a r t i s a n q u i a m a n i é l ' o u t i l ; des é c l a t s s i t u é s a u t o u r des b a s e s d e s os
m o n t r e n t q u e ces d e r n i e r s r e p o s a i e n t s u r u n c o r p s d u r p e n d a n t l ' o p é r a tion.
T o u t e s les e x t r é m i t é s p o r t a n t les é p i p h y s e s o n t été sciées en biais
vi-
g o u r e u s e m e n t et à g r a n d s t r a i t s , a l o r s q u e les r e c o u p e s s e c o n d a i r e s s o n t
xvutsrponmlihf
4
CONGRÈS DE R E I M S . —
1907
parfaitement sciées d'équerre a\ec un outil ne laissant presque pas de
traces. Cet outil est sûrement une scie en acier. La largeur des traits de
scie varie entre 1 millimètre et demi et 3 millimètres ; l'équarrissage des
os n'a eu lieu qu'après l'ablation de leurs épipbyses.
Après l'équarrissage, de nouveaux sciages ont été pratiqués pour ne
porter sur le tour que des sections à parois suffisamment épaisses, afin
que la cavité médullaire soit encore entourée, après le tournage, d'une
épaisseur d'os suffisante. Quarante de ces premiers fragments éliminés
ont de 35 à 65 millimètres de longueur. D'autres sont des recoupes
n'ayant parfois que 5 millimètres d'épaisseur.
Certains fragments portent jusqu'à sept facettes d'équarrissage ; les
autres en présentent de deux à six.
Le plus large des fragments polygonaux a 35 millimètres de diamètre,
le plus petit 19 millimètres.
Parmi ceux qui sont taillés sur les cotés seulement, il y a des diamètres
de 37 à 21 millimètres.
Trente-cinq segments appartiennent à des petits os.
Nous avons constaté que toutes les parties spongieuses avaient été soigneusement éliminées.
Nous n'avons pas relevé de traces de serrage des os, qui, pourtant, ont
dù être mis à l'étau pour l'opération du sciage. L'étau était probablement
en bois.
Nous avons remarqué de larges traces d'amorçage du trait de scie ; cet
outil, lorsqu'il porte de grosses dents, s'égare à droite et à gauche avant
de trouver sa voie, surtout sur des matières dures.
Quelques exemples montrent que l'ouvrier n'a pas toujours scié l'os
complètement, car il y en a qui ont été sectionnés avant le sciage complet.
Les petits cylindres équarris et mis à la longueur utile étaient ensuite
portés au tour — mais sur quel tour ? Les Romains, qui connaissaient le
tour à potier et la meule marchant au pied, connaissaient aussi le tour
horizontal, probablement à volant, car il paraît impossible qu'ils aient
tourné à l'archet les objets métalliques qui nous sont parvenus ; quelquesuns de ces objets sont parfois d ' u n grand diamètre : vases, pieds divers,
têtes de timons, roues, pesons, poulies, etc.
D'autre part, étant donné que la cavité médullaire de nos charnières est
toujours irrégulière, qu'elle ne peut être naturellement centrée, il a fallu
garnir cette cavité avec du bois probablement, pour permettre de fixer l'os
sur la contre-pointe et la griffe d'entraînement du tour.
Si ces charnières ont été tournées à l 'archet, comme le font encore les
Kabyles et d'autres peuples, pour fabriquer des bracelets en corne par
exemple, cela suppose que la tige, l'arbre qui porte la poulie d'entraînement, recevait aussi un ou plusieurs os, et que ces derniers y étaient fixés
yxvut
zyxvutsrqp
Λ
ASSY E T M U L L E R .
ATELIER
GALLO-ROMAIN
5
et. calés soigneusement, cela dans le but d'é\iter toute erreur de centrage
et de flottement.
Mais, en présence du fini apporté dans l'exécution des charnières que
nous avons pu examiner en quantité, il faut plutôt songer à un tour continu, l'artisan ayant ses deux mains libres pour promener son outil sur le
support.
zvutsr
L'outil devait être une sorte de gouge semblable à celle encore en usage
chez les tourneurs en bois.
Nous avons deux échantillons, qui ont éclaté au cours du tournage et
qui montrent bien les traces de l'outil.
Dans les charnières finies ou inachevées, nous n'avons jamais trouvé
les traces d ' u n frottement quelconque ayant impressionné la cavité médullaire.
Dans quelques cas, le tournage n'a pas atteint toute la surface de la
charnière certaines montrent encore des traces des gouttières longitudinales qui existent naturellement sur les deux faces larges des métacarpiens des bovidés.
Les sections planes des cylindres (charnières terminées) sont presque
toutes un peu concaves ; celles qui sont à peu près planes appartiennent à
des charnières fortement usagées.
Les trous transversaux sont percés exactement à la moitié de la hauteur
du cylindre, mais ils ne sont pas toujours forés bien transversalement ; si
la mèche avait continué le trou, dans plusieurs cas elle serait sortie de
côté.
Tous les cylindres portent à l'intérieur l'empreinte de la pointe de la
mèche qui, après avoir fait le trou, a marqué son trajet à l'opposé dans le
canal médullaire en commençant un second trou. Dans une de nos charnières, la pointe de la mèche a même perforé complètement la deuxième
paroi (jig. -i))
Pour forer un trou rond, à la mèche, dans un tube quelconque, il faut
que le tube soit complètement
rempli d'une matière
assez dure, du bois, par exemple ; sans cela, la mèche crèverait la paroi interne en faisant un trou irrégulier et en déterminant des esquilles à l'intérieur.
Or, sur les quatorze trous que nous avons examinés
attentivement, aucun n'a la moindre trace d'esquil- Fig 4 (demi-grandeur)
les ; par contre, deux ou trois montrent, à l'intérieur,
une très légère bavure annulaire, fait qui se produit fréquemment quand
on perfore de l'os ou de la corne de cervidé.
ο
YUTSRQO
zyxvutsrqp
zvutsrponm
CONGRES
DE
REIMS.
1007
HISTORIQUE
Ces os t o u r n é s ont l o n g t e m p s i n t r i g u é les archéologues ; les u n s y ont \ u des
sifflets, sifflets des Morts (renseignement
du Dr M. Baudoin)
; d ' a u t r e s en ont
fait des sections de flûtes, des appeaux, etc. Il semble q u e c'est M. G. de Mortillet qui a, le premier, d o n n é à ces os leur véritable état-civil en les identifiant
à des charnières de coffres quelconques.
On p r é t e n d , mais sans q u ' i l n o u s ait été possible de trouver u n fait précis,
q u ' à Pompéi, grâce au système de remplissage par d u plâtre des cavités rencontrées d a n s les fouilles, on aurait trouvé des charnières en place, fait qui, s'il
est exact, t r a n c h e r a i t a b s o l u m e n t la question (1).
M. l'abbé Baudry aurait trouvé, en Vendée, je crois (rens. M. Baudoin) u n
coffret ayant encore un charnon en place. M. le D r M. Baudoin, q u i a trouvé de
n o m b r e u x spécimens de ces os tournés, d a n s les p u i t s f u n é r a i r e s de la Vendée,
en fait aussi des charnières de coffrets.
Nous n'avons rien trouvé d a n s les dictionnaires de Rich, de D a r e m b e r g et
Saglio, d a n s le Grand Larousse, la Grande Encyclopédie, les Dictionnaires latin-français et français-latin, etc., etc. Ils d o n n e n t au m o t cardo la valeur de
nos m o t s pivot, crapaudine,
gond, etc.
Rich prétend que les r o m a i n s o n t du avoir u n m o t spécial p o u r désigner u n e
charnière, qui, dit-il, ne p e u t être appelé cardo, mais bien gingliums,
charnière.
Lebaigue d o n n e le t e r m e Verticula pour articulation, charnière.
C'est tout ; pas de figure, pas d'analyse c o n c e r n a n t nos charnières.
MODE
D'EMPLOI
PRORABLE
E t a n t d o n n é q u e les c h a r n i è r e s en os, t o u j o u r s s e m b l a b l e s , se t r o u v e n t
d a n s t o u s les f o n d s g a l l o - r o m a i n s u n p e u i m p o r t a n t s ,
dans toutes
c o n t r é e s f r é q u e n t é e s p a r les R o m a i n s , o n p e u t a f f i r m e r q u ' e l l e s
les
étaient
d ' u n usage courant.
FIE. 5
FIE. (Ί
L ' a b s e n c e d ' o r n e m e n t a t i o n a u t r e q u e q u e l q u e s filets en c r e u x o b t e n u s
(1) Ayant voulu avoir c o n f i r m a t i o n de ce fait par le conservateur d ' u n grand m u s é e
italien, il n o u s a été impossible d ' o b t e n i r u n e réponse, m ê m e en envoyant un t i m b r e
italien p o u r cela.
xv
VASSY
ET
MUI.LER.
ATELIER
GALLO-ROMAIN
zyxvu
7
zvut
yxvutsrpon
au tournage indique que ces os cylindriques étaient noyés dans d'autres
corps, et que leurs fonctions rendaient tous décors ou ornementation inutiles et même gênants.
Si nous supposons nos cylindres noyés à moitié bois (Jig· 5) dans l'angle d ' u n coffre (comme les gonds d'une fenêtre), le couvercle pourra être
ouvert à angle droit (jig. 6). Il en sera de même pour un ventail quelconque, une fenêtre, etc.
Comment fixait-on les charnons en os composant une charnière complète Ρ L'examen des échantillons en notre possession peut nous l'apprendre.
Chaque charnon porte un ou plusieurs trous transversaux. Ces trous ne
contiennent jamais de tiges de fer ou de bronze ou des traces de ces
métaux (1), la cavité médullaire non plus. Or, plus de la moitié des
trous transversaux observés sont circonscrits, à leur orifice externe, par
un nombre variable de crans (Jig. 7). Si nous supposons une cheville de
bois enfoncée de force dans le trou, cette cheville aura une tête conique,
résultant de son façonnage (Jig. 8). On cylindrera cette cheville en enlevant le bois en excès, au couteau par des coupures verticales ; la lame du
couteau arrivera brusquement sur l'os et y marquera son empreinte.
FIG. 7
FIE. 8
FIG. 9
Voilà nos charnons avec des chevilles de bois, solidement fixées ; si
nous pratiquons, dans le couvercle et dans le coffre, des trous pour recevoir ces chevilles et les y coller (Jig. 9), le couvercle, en s'ouvrant, entraînera a\ec lui tous les charnons pairs adhérant, les impairs étant fixés
au coffre.
Le seul fait que l'emboîtage des charnons est fait à mi-bois suffit pour
que le mouvement sùit très doux et normal, sans qu'il ait une goupille
(1) Dans u n seul cas, sur près d ' u n millier, n o u s avons t r o u v é d u fer oxydé dans le
Irou transversal.
8
CONGRÈS DE R E I M S .
—
zyxvutsr
1907
longitudinale passant dans les creux médullaires d ' u n bout à l'autre de
la charnière.
Mais, autre problème, l'irrégularité des trous médullaires, l'absence de
traces de frottement rotatif ou giratoire sur leurs parois, indiquent bien
qu'on n'y a introduit aucune tige métallique. On aurait pu, pourtant, y
loger une baguette de bois, même une lanière de gros cuir, ceci à condition que les chevilles, fixées dans les trous transversaux, aient été arasées
et ne débordent pas à l'intérieur. Il est certain que la présence d ' u n gros
cordon de cuir suivra à merveille les sinuosités du creux de la charnière
et que le couvercle pourra rester ouvert à angle droit, sans que ses chaî nons se déboîtent de ceux du coffret.
Il est certain, aussi, que les traces d'usage laissées à l'intérieur des
chaî nons par une goupille en cuir seront difficilement appréciables ; une
tige de bois pourrait en laisser, mais aurait manqué de souplesse·
A plus forte raison, une goupille de fer ou de cuivre aurait laissé des
traces de frottement et d'oxydation.
CONCLUSIONS
Les os de Sainte-Colombe-lè-\ ienne sont certainement des déchets
d ' u n artisan gallo-romain, fabricant de cylindres en os perforés de trous
transversaux recoupant la cavité médullaire.
Un certain nombre de ces cylindres, réunis et accolés par leurs faces
planes, constituent une charnière.
Chaque cylindre ou charnon composant une charnière paraît avoir reçu
une cheville ligneuse dans chaque trou transversal. C'est par ces chevilles que l'on a pu fixer chaque charon au couvercle ou au coffre.
On peut songer au goupillage d'une charnière ainsi composée avec une
baguette de bois et mieux encore avec une lanière de cuir.
Toutes ces déductions sont tirées de l'examen des traces qu'ont laissées
sur les os examinés les procédés techniques de fabrication.
Nous pensons être dans le vrai, dans cette longue analyse ; néanmoins,
nous accepterions avec plaisir les solutions meilleures qui nous seraient
proposées.